Quand l'IVG cache des féminicides
Déclaration orale faite au cours de la 44e session régulière du Conseil des droits de l'homme (Genève, Suisse) lors du dialogue interactif avec la Rapporteuse spéciale sur la violence contre les femmes, ses causes et conséquences, le 7 juillet 2020.
Mme la Vice-Présidente,
L’ECLJ remercie la Rapporteuse spéciale sur la violence faite aux femmes pour ses derniers rapports et souhaiterait faire part de deux réflexions.
La première à propos de la notion de « féminicide ». Le féminicide concerne avant tout la raison principale pour laquelle une femme est tuée : en raison de son sexe. Or, pour les femmes journalistes, comme vous l’écrivez dans votre rapport, c’est bien souvent en raison de leur métier d’investigation qu’elles sont tuées, pas nécessairement parce qu’elles sont des « femmes ».
Selon l’ECLJ, l’usage du mot de féminicide devrait être réservé aux cas où il est bien avéré que c’est le genre féminin qui est à la racine du meurtre, comme cela se constate dans de nombreux cas d’avortements. Dans de nombreux pays, des femmes sont obligées d’avorter parce qu’elles portent un enfant de sexe féminin. Un récent rapport de l’ONU indique qu’il y a un déficit de naissance de142 millions de filles dans le monde, dont 46 millions en Inde. Dans ces cas-là, c’est bien parce qu’il est culturellement honteux ou indésirable d’avoir une fille que des femmes sont avortées pour la seule et unique raison que l’enfant à naître est de sexe féminin.
Par ailleurs, comme vous l’écrivez dans votre dernier rapport sur les violences infligées aux femmes en matière obstétricale : « La stérilisation et l’avortement forcés sont des crimes et des formes de violence à l’égard des femmes » (§21). Or de nombreuses femmes rapportent avoir été poussées par leur employeur, leurs collègues ou même leur conjoint, à avorter, pour des raisons professionnelles et économiques.
Alors qu’en Chine, la politique de l’enfant unique a obligé des millions de femmes à avorter, en Occident, c’est à l’inverse le fait que l’avortement soit disponible à la demande qui permet de faire pression sur les femmes. Des femmes sont poussées à avorter pour garder leur emploi alors que cela ne correspond pas à ce que souhaite réellement de nombreuses femmes : concilier travail et maternité.