F. van Daele : ES Liberté de religion
Frans van Daele a été nommé le 7 décembre 2022 envoyé spécial pour la promotion de la liberté de religion ou de conviction en dehors de l’Union européenne (UE). Après une vacance de plus d’un an, il succède à Christos Stylianides resté 5 mois en poste et lui-même nommé en mai 2021 après une vacance de deux ans. Ces vacances semblent démontrer le peu d’intérêt de la Commission européenne pour ce poste fondé en 2016[1]. Pourtant en 2019, le premier envoyé spécial, Jan Figel, avait joué un rôle crucial dans la libération d’Asia Bibi, condamnée à mort puis longuement détenue pour « blasphème », démontrant ainsi l’importance de sa mission. L’ECLJ, spécialisé dans la défense de la liberté religieuse depuis 1998, avait collaboré d’une façon très riche avec Jan Figel, et se félicite de la nomination de Frans van Daele. L'ECLJ espère pourvoir le soutenir de la même façon dans son mandat.
Frans van Daele est l’ancien chef de cabinet du roi de Belgique. Avant cela il a eu une longue carrière administrative et diplomatique de plus de quarante ans. Il a en particulier été représentant permanent de la Belgique auprès de l’OTAN, ambassadeur de Belgique aux États-Unis ainsi qu’ambassadeur et représentant permanent auprès de l’Union européenne à Bruxelles.
Dans une résolution du 18 janvier 2023[2], le Parlement européen se félicitait de sa nomination et demandait au Conseil et à la Commission d’évaluer le mandat afin de lui fournir des ressources humaines et financières suffisantes. Le Parlement rappelait enfin que « les fonctions de l’envoyé spécial devraient se concentrer sur la promotion et la protection de la liberté de pensée, de conscience, de religion et de conviction, ainsi que sur le droit à ne pas croire, à l’apostasie et à l’athéisme ». Il soulignait que l’envoyé spécial devrait également accorder une attention particulière aux conversions forcées, à l’utilisation abusive des lois sur le blasphème et à la situation des personnes non croyantes en danger (§22).
Une résolution du 15 janvier 2019 précise les grandes orientations du mandat de l’envoyé spécial[3]. Elle indique ainsi que « la liberté de religion ou de conviction implique le droit à la liberté de croire ou de ne pas croire, le droit de changer de religion ou de conviction ou d’y renoncer sans aucune contrainte et le droit de pratiquer et de manifester la religion ou la conviction de son choix, individuellement ou en commun, tant en public qu’en privé ». Dans le cadre de son mandat, l’envoyé spécial pourrait alors enquêter sur différents enjeux comme celui de la proportionnalité des restrictions au culte durant le covid ou la situation de persécution que vivent beaucoup de personnes quittant l’islam. Ce sont en effet des enjeux fondamentaux comme le précise la résolution qui « souligne que la liberté de pensée, de conscience, de religion ou de conviction, communément désigné « droit à la liberté de religion ou de conviction », dans le cadre européen et dans la présente résolution, constitue un droit de l’homme, une valeur de l’Union et un fondement important et indéniable de la dignité, qui ont une incidence majeure sur les individus, leur identité personnelle, le développement ainsi que les sociétés ».
Aujourd’hui, les États membres de l’Union européenne considèrent que la promotion de la liberté de religion ou de conviction est un élément de la coopération internationale et du développement devant bénéficier du soutien de la Commission européenne et de la direction générale de la coopération internationale et du développement (DG DEVCO). Il est dommage que le mandat ne concerne exclusivement que les situations en dehors de l’UE. C’était une condition diplomatique exigée pour que le mandat existe. L’ECLJ regrette cet état de fait et cette réticence des États membres à être ouvert aux éventuelles critiques qui pourraient être formulées contre eux. Néanmoins, il y a beaucoup à faire en dehors de l’Union européenne, en particulier dans le cadre de la politique européenne de voisinage (PEV) et des initiatives de coopération régionale : le partenariat oriental et l’Union pour la Méditerranée. Dans ce cadre, le mandat pourrait enquêter sur la situation du Maroc et de l’Algérie. L’ECLJ s’est déjà alarmé de la situation de la liberté des chrétiens au Maroc et avait condamné les attaque de l’Algérie contre la liberté d’expression en matière religieuse en prenant la défense de l’islamologue algérien Saïd Djabelkhir, condamné le 21 avril 2021 à une peine de trois ans de prison et à une amende de 50 000 dinars pour « offense à l’islam », « dénigrement du dogme » et « des préceptes de l’islam » en vertu de l'article 144 bis 2 du Code pénal algérien réprimant le blasphème.
L’ECLJ réitère son soutien à Frans van Daele dans son mandat d’envoyé spécial pour la promotion de la liberté de religion ou de conviction en dehors de l’Union européenne et lui souhaite le plus grand succès dans sa mission.
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[1] Création en 2016 par le président de la Commission dans le sillage de la résolution du Parlement du 4 février 2016.
[2] Résolution du Parlement européen du 18 janvier 2023 sur les droits de l’homme et la démocratie dans le monde et la politique de l’Union européenne en la matière – rapport annuel 2022 (2022/2049(INI))
https://www.europarl.europa.eu/doceo/document/TA-9-2023-0011_FR.html#def_1_6
[3] https://www.europarl.europa.eu/doceo/document/TA-8-2019-0013_FR.html