Institutions Françaises

Confinement : comment maintenir l’instruction religieuse et la catéchèse ?

Confinement: l’instruction religieuse?

Par Grégor Puppinck1605280179370
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Le 29 octobre 2020, le Premier ministre a pris un décret n° 2020-1310 « prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l’épidémie de covid-19 dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire ». Celui-ci interdit les réunions et rassemblements de plus de six personnes, y compris dans les lieux de culte, mais maintient « l’accueil des usagers dans les établissements d’enseignement ».

Qu’en est-il alors de l’enseignement religieux des élèves, le décret étant silencieux sur ce point ? En pratique, il apparaît que la situation varie considérablement selon les établissements, les paroisses et les diocèses. Nous avons donc essayé de faire le point sur ce qu’il est permis de faire, afin, autant que possible, de ne pas priver inutilement les enfants l’enseignement religieux dont ils ont besoin et auquel ils ont droit (CEC § 2037).

À titre préalable, il convient de souligner que le droit de recevoir un enseignement religieux et de le dispenser à ses enfants fait partie intégrante de la liberté de religion garantie par les droits de l’homme, notamment par la Convention européenne des droits de l’homme (article 9 et article 2 du 1er protocole additionnel). Au plan mondial, le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (1966) précise que les États « s’engagent à respecter la liberté des parents […] de faire assurer l’éducation religieuse et morale de leurs enfants, conformément à leurs propres convictions » (article 13, § 3).

En France, l’instruction religieuse dans l’enseignement public est gouvernée par la règle générale énoncée à l’article L. 141-2, deuxième alinéa, du code de l’éducation, suivant laquelle « L’État prend toutes dispositions utiles pour assurer aux élèves de l’enseignement public la liberté des cultes et de l’instruction religieuse ». 

Cette règle suit immédiatement une autre règle, figurant à l’article L. 141-2, qui prévoit que, « [s]uivant les principes définis par la Constitution, l’État assure aux enfants et adolescents dans les établissements publics d’enseignement la possibilité de recevoir un enseignement conforme à leurs aptitudes dans un égal respect de toutes les croyances ». Ce renvoi à la Constitution fait référence à l’article 1er de la Constitution selon lequel « la République […] respecte toutes les croyances ». Cette règle découle également de la jurisprudence du Conseil constitutionnel sur la liberté de conscience (C. const., 23 novembre 1977). Ces règles inscrites à l’article L. 141-2 découlent donc d’un principe constitutionnel dont on peut se prévaloir et qui trouve à s’appliquer spécifiquement à l’enseignement religieux délivré dans les établissements publics et privés d’enseignement.

 

S’agissant de l’application de ces règles, il convient de distinguer entre établissements privés et publics, et entre les écoles élémentaires et le secondaire :

S’agissant des établissements privés confessionnels, la question de savoir si le décret du 29 octobre 2020 a une incidence sur l’enseignement religieux qui y est délivré ne se pose pas. En effet, un tel enseignement fait partie intégrante de leur projet éducatif et est assuré au même titre que les autres enseignements.

S’agissant de l’enseignement public, l’enseignement religieux demeure assuré en Alsace et en Moselle, par les personnels enseignants dans le cadre scolaire normal, conformément au droit local.

Dans le reste de la France, la règle rappelée ci-dessus, selon laquelle « l’État prend toutes dispositions utiles pour assurer aux élèves de l’enseignement public la liberté des cultes et de l’instruction religieuse » (art. L. 141-2, deuxième alinéa, du code de l’éducation) est mise en œuvre de manière différente selon que l’instruction religieuse est donnée dans une école élémentaire publique ou dans un établissement public d’enseignement secondaire.

Dans le premier cas de l’école élémentaire publique, l’article L. 141-3 du code de l’éducation prévoit qu’un jour de la semaine, en plus du dimanche, est laissé libre « afin de permettre aux parents de faire donner, s’ils le désirent, à leurs enfants l’instruction religieuse, en dehors des édifices scolaires ». Comme le précise l’article R. 141-1 de ce code, l’instruction religieuse est ainsi donnée, si les parents le désirent, à l’extérieur des locaux et en dehors des heures de classe, soit directement par les parents, soit dans les paroisses et autres lieux de cultes. Deux cas de figure sont alors possibles :

Soit la paroisse dispose d’un patronage, ou bénéficie du statut de centre d’accueil de loisirs ou de jeunes[1], elle peut alors à ce titre continuer à accueillir les élèves de façon périscolaire, c’est-à-dire en semaine, avant ou après l’école, et le mercredi, et assurer à cette occasion les temps de catéchèse.

Soit la paroisse n’a pas d’entité disposant d’un tel statut, elle doit alors assurer les cours par petits groupes, suivant les règles s’appliquant aux lieux de culte, à savoir en évitant « tout regroupement avec des personnes ne partageant pas leur domicile », selon la précision apportée au considérant 16 de l’ordonnance du Conseil d’État n° 445825 et autres du 7 novembre 2020. Un regroupement étant caractérisé au-delà de six personnes selon le III de l’article 3 du décret du 29 octobre 2020, celui-ci peut être lu comme interdisant toute réunion de plus de six personnes ne partageant pas le même domicile, y compris l’aumônier. Cet enseignement peut être assuré en tout lieu de culte. Il n’a pas à être autorisé, car il fait partie intégrante de l’exercice de la liberté de culte. Une autre possibilité consiste à se rapprocher d’une école, afin que l’instruction religieuse y soit éventuellement assurée dans le cadre scolaire ou périscolaire.

Dans le second cas des établissements publics d’enseignement secondaire, à savoir les collèges et les lycées, le décret n° 85-924 du 30 août 1985 dispose que « l’enseignement religieux prend place dans le cadre du temps scolaire normal de l’établissement dont les principes sont fixés par le conseil d’administration ». Il peut être assuré à l’extérieur de l’établissement, ou à l’intérieur, en particulier « si la sécurité ou la santé des élèves le justifie » (art. R141-4 du Code de l’éducation).

Lorsque l’enseignement religieux est dispensé à l’intérieur de l’établissement, aucune raison ne justifie qu’il soit supprimé dès lors qu’il obéit aux règles sanitaires en vigueur dans l’établissement.

Lorsque l’enseignement religieux est dispensé à l’extérieur de l’établissement, il peut être maintenu soit par petits groupes (culte privé), soit dans le cadre d’un patronage (centre d’accueil). L’aumônier peut aussi demander, pour la santé des élèves, à être accueilli à l’intérieur de l’établissement public, en invoquant la disposition déjà citée (R141-4). La circulaire n° 88-112 du 22 avril 1988 prévoit à cet égard que les conditions de fonctionnement de l’aumônerie sont décidées en concertation entre le chef d’établissement et l’aumônier, en particulier en cas de modification de l’organisation du temps scolaire.

Note rédigée par Gaspard Dassonville et Grégor Puppinck, avec la contribution de juristes français magistrats et enseignants.

[1] L’article 32 du décret du 20 octobre 2020 permet à deux types de structures de continuer un accueil périscolaire (avant et après l’école et le mercredi ; le samedi si l’élève a école le matin) : 1° les accueils de loisirs déclarés ou non dans les conditions définies par le 1° du II de l’article R227-1 du CASF 2° les accueils de jeunes (+ de 14 ans) déclarés à la DDCS définies par le 2° du II de l’article R227-1 du CASF, dans le respects des conditions sanitaires rappelées au II de l’article 36 du décret du 20 octobre 2020 propres à l'accueil des usagers dans les établissements d’enseignement.

Pour la défense des Chrétiens persécutés
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