ECHR

Romania: "open prison"... except for worship?

Romania: Open Prison even for Worship?

By Nicolas Bauer1644422400000

This article will be translated soon.

 

N.B. : Depuis la publication de l’article ci-dessous, la CEDH a rendu l’arrêt Spînu c. Roumanie, le 11 octobre 2022. Elle a jugé que la liberté de religion du requérant n’a pas été violée. Les juges ont bien résumé les arguments de l’ECLJ et les ont utilisés pour appuyer leur raisonnement. Ils ont pris en compte les spécificités du milieu carcéral et les possibilités alternatives offertes par la prison pour pratiquer un culte. La CEDH a laissé une large marge d’appréciation à l’État roumain sur ses décisions sanitaires. Nous ne remarquons aucun changement dans les principes appliqués par rapport aux jurisprudences précédentes sur la liberté de religion ou sur le Covid.

 

L’interdiction de la célébration publique des cultes en période épidémique est en débat à la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH), à l’occasion de deux affaires pendantes, dont nous avons déjà résumé les enjeux dans un article, une conférence et une émission de télévision.

L’ECLJ a été autorisé à intervenir dans une troisième affaire de liberté de culte en temps de Covid : Spînu c. Roumanie. Nous avons déposé en janvier nos observations écrites à la Cour européenne.

 

Un contexte pénitentiaire

Cette affaire est différente des précédentes. Ce qui est en cause n’est pas l’interdiction générale et absolue du culte dans le contexte du premier confinement, mais les restrictions du culte dans un contexte pénitentiaire, pour des raisons sanitaires.

M. Spînu est détenu à la prison de Jilava à Bucarest et est membre de Église adventiste du septième jour. Entre 2019 et le février 2020, il a participé au culte adventiste à l’extérieur de la prison les samedis. Puis, l’état d’urgence sanitaire a privé tous les Roumains de cette liberté de culte, ainsi que d’autres libertés. À la reprise du culte public, en juin 2020, le requérant a souhaité y participer de nouveau. Sa demande lui a été refusée en août 2020 pour des raisons sanitaires et il n’a plus pu, depuis lors, se rendre à son église habituelle. Après avoir contesté la décision des autorités pénitentiaires devant le juge interne, il a déposé une requête à la CEDH.

 

Un motif sanitaire et non sécuritaire

Selon la jurisprudence européenne, les détenus continuent de jouir de leur droit de pratiquer leur religion. Cependant, des restrictions à ce droit, ainsi qu’à d’autres droits et libertés, découlent inévitablement des circonstances et finalités de l’emprisonnement. C’est en particulier le cas des restrictions nécessaires à la protection de la sécurité publique. En règle générale, le droit de manifester sa religion en dehors de la prison n’est pas garanti[1]. L’affaire Spînu c. Roumanie se distingue en revanche des précédentes jugées par la Cour européenne, en ce que le refus de l’exercice de ce droit spécifique se fonde non sur des raisons disciplinaires, mais sur des raisons sanitaires.

En effet, M. Spînu est dans une prison particulière, ouverte sur l’extérieur[2]. Au sein de cet établissement, il bénéficie d’un « régime ouvert » de détention, c’est-à-dire le régime comportant le plus de libertés, comme celle de travailler à l’extérieur de la prison. L’article 38 § 3 de la loi roumaine n° 254/2013 prévoit également dans son cas la possibilité de participer à des activités religieuses à l’extérieur de la prison, sans surveillance, avec l’approbation du directeur de la prison. M. Spînu a déjà bénéficié de cette possibilité, avant les restrictions sanitaires. Si elle lui est aujourd’hui refusée, ce n’est pas en lien avec un danger nouveau que lui-même causerait, mais pour des motifs sanitaires.

C’est pourquoi, la Cour européenne devra effectuer une mise en balance entre le droit à la liberté de religion du requérant et l’objectif de protection de la santé publique. Dans nos observations écrites, nous avons dégagé plusieurs critères à intégrer pour réaliser cette mise en balance. Il s’agit en particulier de prendre en compte les spécificités de la vie en collectivité, le cumul de l’interdiction contestée par le requérant avec d’autres mesures sanitaires, ou encore les possibilités alternatives offertes par la prison pour pratiquer le culte.

 

Le requérant laissé dans le flou

À partir de ces critères, fondés sur la jurisprudence, il est difficile de trancher l’affaire Spînu c. Roumanie. Il est toutefois important de noter que l’épidémie actuelle de Covid n’est pas une justification suffisante pour laisser le requérant dans le flou concernant ses droits dans les mois et années à venir. Pour éviter qu’il soit soumis à des décisions arbitraires, le requérant doit pouvoir savoir au moins quelles sont les conditions sanitaires qui lui permettront de retourner à l’église adventiste le samedi.

Plus fondamentalement, la question plus générale de la mise en œuvre de la neutralité et de l’impartialité de l’État doit être posée. Face à la situation sanitaire, les États focalisent leur action sur la mobilisation de moyens matériels pour lutter contre l’épidémie. En particulier, le cumul des mesures sanitaires vise à freiner les contaminations. Cependant, cette épidémie ne soulève pas uniquement l’enjeu biologique de freiner les contaminations, mais aussi des enjeux sociaux et spirituels. Trop souvent, les États préfèrent se focaliser uniquement sur la sauvegarde de la vie et de la santé biologiques et nient les libertés permettant de préserver la vie et la santé sociales et spirituelles. Cette politique n’est pas neutre et impartiale, sur le plan religieux. C’est un athéisme pratique, qui s’oppose de fait à l’enseignement ou à la pratique de la plupart des religions.

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[1] J.L. c. Finlande (déc.), n° 32526/96, 16 novembre 2000.

[2] Laura-Maria Ilie et Florentin Cassonnet, « Jilava, une expérience roumaine en régime ouvert », HesaMag #19, Dossier spécial 9/36, 1er semestre 2019, accessible sur le site du European Trade Union Institute.

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