French Institutions

Vincent Lambert: What now?

Vincent Lambert: What now?

By Grégor Puppinck1560729420000

In French only.

Article paru dans l'édition papier de Valeurs Actuelles, la semaine du 3 juin 2019.

Le 20 mai, le cœur de tous les Français battit au rythme de celui de Vincent Lambert. Que l’on veuille sa mort, ou que l’on respecte sa vie, son destin passionne le pays. Il faut être un grand peuple pour se déchirer ainsi sur le sort d’un pauvre homme quand, en tant d’autres lieux, il serait déjà mort misérablement. Mais le spectacle de l’euthanasie d’un fils, sous les yeux de sa mère, est abject ; et la Cour d’appel de Paris a eu la décence de faire cesser cette agonie télévisée. Elle a jugé qu’en violant ses engagements internationaux, alors que la vie d’un homme en dépend, l’Etat français a commis une voie de fait.

Ainsi, en une journée, Vincent Lambert est comme « mort et ressuscité », sa mère se tenant douloureusement à ses côtés. Après la liesse des uns, et la frustration des autres, que va-t-il se passer ? On peut croire qu’il est effectivement sauvé, même si certains s’obstinent encore à le faire mourir.

 

C’est le Comité des droits des personnes handicapées de l’ONU qui l’a sauvé. Ce Comité, saisi sur le conseil de l’ECLJ, est chargé par les États de veiller au respect de la Convention relative aux droits des personnes handicapées. À ce titre, il peut recevoir des « plaintes » individuelles -comme celle introduite par les parents Lambert-, et demander aux États de prendre « les mesures conservatoires nécessaires pour éviter qu'un dommage irréparable ne soit causé aux victimes de la violation présumée ». Ce qu’il fit.

Certes, ces demandes ne sont pas contraignantes en ce que l’ONU ne peut en imposer le respect par a force, mais elles n’en sont pas moins obligatoires car la France est tenue par sa parole. Alors que la contrainte repose sur la force, le droit international ne peut compter que sur l’honneur des gouvernements à respecter leurs propres engagements. Ce à quoi le gouvernement a manqué. Le non-respect de telles mesures est systématiquement sanctionné par l’ONU, et ouvre droit à réparation. Le gouvernement français le sait, mais il a fait passer la force avant le droit. C’est bien ce qu’ont reconnu la Cour d’appel de Paris et le Défenseur des droits, en déclarant que les mesures provisoires « doivent être respectées par l’État, au risque d’entraver l’exercice effectif du droit de plainte prévu par le Protocole facultatif ».

C’est seulement si le Comité avait outrepassé ses compétences, en statuant ultra vires, que la France aurait pu légitimement contester ses demandes. Mais tel n’est pas le cas en l’espèce.

 

Certes, le Gouvernement, le CHU ou le Dr Sanchez peuvent se pourvoir en cassation. Mais ce recours porterait probablement moins sur l’obligation de respecter les mesures provisoires que sur la définition de la voie de fait. En effet, certains prétendent que le juge judiciaire ne serait compétent que pour défendre la propriété privée et les libertés fondamentales des personnes - et non pas leur vie - contre les atteintes manifestement illégales de l'administration. C’est oublier que la vie est un prérequis à l’exercice de tous droits et libertés. L’obligation de respecter les mesures conservatoires ne devrait pas être remise en cause, même en cassation.

Se pose dès lors la question du sort de Vincent Lambert, car la procédure à l’ONU peut durer des années. Il n’est pas décent de le maintenir enfermé dans une unité de soins palliatifs inadaptée à son état de santé, et qui s’est totalement décrédibilisée. Il est évident qu’il doit être confié aux soins de l’une des unités spécialisées qui se sont proposées de l’accueillir ; et ce malgré l’opposition du médecin et de Rachel Lambert qui souhaitent tous deux sa mort.

Le mieux serait que le CHU de Reims ou le médecin décident enfin, d’eux-mêmes, ce transfert. A défaut, un nouveau recours judiciaire s’imposerait. Une alternative serait que le juge retire à Rachel Lambert la charge de la tutelle, pour la confier à une personne moins impliquée émotionnellement.

On n’entendrait plus alors parler de l’affaire Lambert.

Sauf peut-être dans quelques années, lorsque le Comité de l’ONU aura jugé si la privation de soins dont est victime Vincent Lambert depuis 2012, et la décision de le faire mourir de soif sont conformes à la Convention relative aux droits des personnes handicapées. Il y a lieu d’en douter, car cette Convention garantit le droit à la vie des personnes handicapées à égalité avec les personnes valides, et interdit explicitement « tout refus discriminatoire de fournir des soins ou services médicaux ou des aliments ou des liquides en raison d'un handicap ». Or, c’est précisément ce qui a été imposé à Vincent Lambert.

Ainsi, à l’ONU, l’enjeu de l’affaire Lambert est de taille : il porte sur la conformité au droit international de la loi Leonetti-Claeys, en ce qu’elle permet l’euthanasie déguisée des personnes handicapées. Ce n’est plus seulement la vie de Vincent Lambert qui est en jeu, mais celles des 1500 autres personnes qui partagent son handicap en France.

 

Il s’agit donc, une nouvelle fois, de décider s’il est permis d’« accorder une mort miséricordieuse aux malades qui, selon les critères humains, auront été déclarés incurables après un examen critique de leur état de santé », suivant les mots employés par Adolf Hitler il y a tout juste 80 ans pour autoriser le programme secret d’extermination des personnes handicapées.

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