L'enlèvement d’Hurmüz Diril à ONU
L’ECLJ, avec l’aide des avocats et des membres de la famille d’Hurmüz DİRİL, a soumis une requête auprès du Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires. Ce père de famille chrétienne en Turquie est porté disparu depuis près de deux ans. Le pire est à craindre car son épouse, qui avait disparu en même temps que lui, a été retrouvée, tuée, à quelque distance de son domicile. Malgré cela, la famille déplore l’inaction des autorités turques.
Le 11 janvier 2020, un couple d’éleveurs chaldéens, Hurmüz et Şimuni Diril, disparaissaient de leur petit village de Şırnak, au Sud-Est de la Turquie. Sans nouvelles de ses parents, un des enfants constate l’absence de ceux-ci le 12 janvier et demande des informations au seul voisin présent en hiver dans ces montagnes, Apro Diril.
Apro Diril a d’abord affirmé qu’Hurmüz et Şimuni étaient partis sans dire où ils allaient. Ce fils sur place a alors cherché ses parents pendant plusieurs jours partout dans le village et aux alentours avec l’aide de la police sans rien trouver. L’enquête de gendarmerie diligentée le 16 janvier 2020 au domicile des parents disparus n’a rien révélé d’anormal dans leurs affaires personnelles et n’a pu découvrir aucun indice quant à ce qui se serait passé ou quant à l’endroit où les disparus seraient allés ou auraient été emmenés.
Ce n’est que deux mois après que Şimuni Diril a été retrouvée morte le 20 mars 2020, près d’un ruisseau situé à 800 mètres de leur domicile. Les blessures sur le corps sans vie de Mme Diril indiquent qu’elle a été abattue par arme à feu.
Du statut de témoin, Apro Diril devint le suspect numéro un. En effet, il a fait plusieurs déclarations contradictoires, avant comme après la découverte du corps de Mme Diril. Il a d’abord affirmé que les disparus étaient partis quelque part sans dire où ils allaient, avant d’expliquer quelques jours après qu’ils avaient été capturés par le PKK. Il a ensuite accusé nommément une personne d’avoir enlevé les parents Diril, avant qu’on découvre avec certitude que cette personne accusée était à des centaines de kilomètres du village au moment de l’événement, etc.
Malgré cette mort et ces mensonges, l’enquête piétine. Plus grave encore, le dossier est « classé secret », Apro Diril est arrêté puis libéré, et les enfants et leurs avocats ont beau demander des actes d’enquêtes précis, rien ne semble être fait et dans tous les cas, ils ne sont informés de rien.
Ainsi, près de deux ans après ces disparitions et sur la base des informations connues, l’ECLJ a envoyé une communication au Groupe d’experts de l’ONU compétent : le Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires. « L’une des principales tâches du Groupe de travail consiste à aider les familles de personnes disparues à faire la lumière sur le sort réservé à leur proche disparu et sur le lieu où il ou elle se trouve. »
L’enjeu de cette saisine est d’obliger la représentation turque de se justifier devant le Groupe d’experts de l’ONU sur cette affaire. Le Groupe de travail va dans un premier temps vérifier le sérieux de la communication que nous lui avons envoyée et éventuellement demander des pièces complémentaires. S’il estime, comme nous le pensons et l’espérons, que la disparition est établie et préoccupante, il demandera au représentant turc des informations et des explications.
Que ce soit un règlement de compte familial, une action d’un groupe terroriste ou que les Diril aient été des victimes collatérales de la lutte du gouvernement contre le PKK, il importe plus que tout, pour les enfants et leurs proches, que la lumière soit faite sur le meurtre de leur mère et sur le sort de leur père.
Avec eux, c’est aussi une des dernières familles chaldéennes qui disparait de cette région…
Vous pouvez retrouver d’autres informations sur cette affaire dans notre interview avec un des avocats de la famille, Me Jérôme Triomphe :