

Exposition à la pornographie et abus sexuel : Contribution de l'ECLJ pour l'ONU
Le 31 octobre 2025, le Centre européen pour le droit et la justice (ECLJ) a remis à Mme Mama Fatima Singhateh, Rapporteuse spéciale des Nations unies sur la vente, l’exploitation sexuelle et les abus sexuels des enfants, une contribution écrite relative au lien existant entre l’exposition des enfants à la pornographie en ligne et les abus sexuels. Il s’agissait de répondre à l’appel à contributions lancé par la Rapporteuse spéciale en vue de préparer son rapport final devant être publié en février ou mars 2026 sur le thème « Protéger les enfants contre la vente, l’exploitation sexuelle et les abus sexuels : progrès, nouveaux défis et voie à suivre ». Son mandat s’achevant en effet en avril 2026, l’objectif est d’en dresser un bilan et de proposer des perspectives pour le mandat suivant.
L’ECLJ a ainsi demandé à la Rapporteuse spéciale de profiter de ce rapport pour affirmer explicitement l’existence du lien entre l’exposition des enfants à la pornographie en ligne et les abus sexuels, afin que puissent être reconnues et combattues toutes les formes d’abus sexuel. Pour étayer cette demande, il a montré d’une part qu’une telle exposition à la pornographie est un facteur d’abus sexuel : il existe en effet une corrélation entre la consommation de pornographie et la violence sexuelle entre mineurs dont l’augmentation est unanimement constatée. Cela peut s’expliquer à la fois en raison de la violence omniprésente dans les contenus pornographiques et des caractéristiques physiologiques (sensibilité à la dopamine, rôle des neurones miroirs etc.) du cerveau des mineurs qui est en pleine formation. D’autre part, l’exposition des enfants à la pornographie en ligne apparaît en soi comme une forme d’abus sexuel : de nombreux professionnels de l’enfance la comparent, en particulier lorsqu’elle n’est pas intentionnelle, soit plus de 40 % des premiers contacts avec celle-ci, à un « viol psychique ». Elle peut ainsi causer de graves dommages aux plans psychologique, physique, comportemental, analogues à ceux d’un abus sexuel dans le monde réel. L’industrie pornographique porte une grande part de responsabilité puisqu’elle sait que des enfants sont exposés de façon non-intentionnelle à ce type de contenus, mais aussi que beaucoup d’autres les consultent volontairement. Mais « enfant » rime avec « argent », alors que l’ARCOM a mis en évidence que les mineurs représentent pas moins de 12 % de l’audience des sites pornographiques.
Dans ce contexte, l’ECLJ a souhaité informer la Rapporteuse spéciale que le Parlement européen prend conscience du lien existant entre l’exposition des enfants à la pornographie et les abus sexuels à l’occasion du vote en première lecture de la proposition de refonte de la Directive européenne du 13 décembre 2011 relative à la lutte contre les abus sexuels et l’exploitation sexuelle des enfants, ainsi que la pédopornographie : le 17 juin 2025, les députés ont adopté un texte exigeant notamment des États membres de l’Union européenne qu’ils incriminent pénalement le fait de diffuser de la pornographie en ligne sans que soit mis en place un outil efficace de vérification de l’âge.
L’ECLJ a également profité de cette contribution pour remercier la Rapporteuse spéciale d’avoir abordé la question de l’exposition des enfants à la pornographie et de ses « effets non négligeables sur le développement de l’enfant, conduisant à une banalisation du phénomène et à une distorsion de ce qui est considéré comme des interactions sexuelles normales » dans un précédent rapport traitant des « Pratiques existantes et nouvelles d’exploitation sexuelle d’enfants dans l’environnement numérique » (2024, A/79/122, § 86) où elle avait indiqué avoir tenu compte de la contribution que l’ECLJ lui avait fournie.