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Système international des droits de l’homme : corruption et influence

HN: Droits de l’homme et corruption

Par Louis-Marie Bonneau1675354389264
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Le scandale qui a éclaté au Parlement européen pose la question de la façon dont des ONG, des fondations privées ou des États pèsent sur les instances internationales. Au moment où le Centre européen pour le droit et la justice (ECLJ) alerte sur le financement occulte de plusieurs experts de l’ONU, l’un de ses chercheurs associés explique la mainmise de certains acteurs sur les entités censées défendre les droits de l’homme…

Article paru dans l'Homme nouveau (n°1774, 31 décembre 2022).

Le système international des droits de l’homme est marqué par un phénomène de « capture » et de « privatisation », deux mots que l’on peut faire cohabiter dans celui d’« influence ». Par système international des droits de l’homme on entend les Cours internationales chargées de faire respecter les Conventions protégeant ces droits (Cour européenne des droits de l’homme et Cour interaméricaine des droits de l’homme, par exemple) ainsi que les organisations internationales spécialisées dans ce domaine (le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme, le Fonds des Nations unies pour la population, ONU Femmes, le Programme des Nations Unies pour le Développement…). Ce phénomène de capture existe sous différents modes : financement des institutions, participation institutionnelle à leur travail, intervention dans la procédure de nomination de leurs membres, et création d’une bulle idéologique étanche autour de ceux-ci.

 

Influencer les droits de l’homme : un investissement rentable

Les rapports financiers des différentes institutions que nous avons citées montrent que celles-ci sont partiellement financées par des contributeurs volontaires privés. Ces principaux contributeurs sont le plus souvent les fondations néolibérales Open Society, Ford, Oak, Gates et MacArthur. Certaines entreprises comme Microsoft, Google, ou Facebook financent aussi le système des droits de l’homme. Elles ne sont néanmoins pas les seules, puisque de grandes universités du système anglo-saxon (souvent elles-mêmes financées par les mêmes fondations néolibérales) apportent aussi leur soutien. Certains États sont également particulièrement actifs comme les Pays-Bas ou la Norvège en finançant les institutions bien au-delà des contributions étatiques ordinaires. Il s’agit alors de se demander ce qui pousse ces différents acteurs à financer ainsi le système international des droits de l’homme.

Pour les néolibéraux, la démocratie et les droits de l’homme sont un moyen d’exporter leur idéologie à travers le monde. Les Cours spécialisées dans les droits de l’homme et les institutions internationales chargées de protéger ces droits deviennent alors des lieux stratégiques à cause de leur influence et de leur pouvoir sur les États. C’est d’autant plus vrai que les ONG peuvent y intervenir aisément et que les fonds néolibéraux peuvent remplir à leur avantage le vide économique résultant du manque de contributions étatiques ordinaires. C’est alors une opportunité pour ces grandes fondations pour faire progresser leur vision des droits de l’homme, c’est-à-dire leur volonté de créer une société ouverte à l’hégémonie du marché et plus spécifiquement à l’accroissement des bénéfices privés. L’idée de segmenter la société en groupes minoritaires est un moyen de liquéfier la société, de la rendre perméable à l’imposition d’un marché global ouvert et sans entrave à la libre circulation des biens et des personnes. L’intérêt économique de ces groupes d’influence est de pousser les États vers des sociétés multiethniques gouvernées par des « États internationaux ».

 

La nouvelle morale : l’idéal de la « société ouverte »

Interrogé par l’ECLJ un ancien expert de l’ONU parle à propos de ces financements de « corruption silencieuse ». Encore faut-il comprendre ce que signifie la « corruption ». Outre son aspect financier, qui on le voit éclabousse aujourd’hui le Parlement européen, la corruption désigne surtout l’affaiblissement intellectuel, moral et idéologique des personnes qui évoluent au sein des mécanismes des droits de l’homme (juges, experts de l’ONU…) qui conduit à l’imposition, par des agents extérieurs, d’un agenda et de thèmes. Elle peut s’expliquer soit parce que ces acteurs des droits de l’homme ne sont pas toujours armés pour détecter et contrer l’influence qu’ils pourraient subir, soit parce qu’ils adhèrent aux messages de ceux qui les influencent. Les influenceurs sont ceux qui possèdent l’hégémonie économique et culturelle nécessaire à leur prédominance sur ce système.

Pour les néolibéraux, l’enjeu est bien de dissoudre les « sociétés fermées » traditionnelles souveraines en se servant du contentieux international et de l’influence de ceux qui font référence dans le domaine, à savoir, par exemple, les experts de l’ONU ou les juges de la CEDH. L’objectif est d’atteindre la « société ouverte », idéal de ce que Marcel De Corte appelait la « dis-société ». Cela passe par une homogénéisation culturelle entre les États et donc par un combat contre les spécificités, les traditions et héritages historiques et religieux. L’ancien expert de l’ONU sur la santé, exprimait bien cette idée dans un de ses rapports : « La xénophobie, les « valeurs familiales traditionnelles » et d’autres formes de discrimination mettent à mal la cohésion sociale, au détriment de tous ». Il avait bénéficié de financements directs d’au moins 425 000 dollars de l’Open Society au cours de son mandat. Ainsi, on observe dans les pays de tradition chrétienne, que les litiges portés devant les Cours européennes sont orientés vers l’émancipation des religions, le « droit à l’avortement », l’euthanasie et les droits des minorités sexuelles. Cette stratégie a une logique économique car, comme le Dr Gaëtan Cliquennois, chargé de recherche au CNRS, l’explique, « la mondialisation économique repose sur la mondialisation culturelle »[1]

 

Un ordre moral binaire

Bien souvent nous avons le sentiment d’assister à l’imposition d’un ordre moral binaire. Dans nos sociétés sécularisées, un nouveau clergé symbolique apparait. Il s’agit des « prophètes des droits de l’homme ». Ce nouveau clergé impose de manière implicite une morale qui doit guider l’action politique. Et avant même de l’imposer, il l’annonce. C’est ce que Charles Péguy écrivait : « Tout commence en mystique et finit en politique ». Dans une société d’athéisme radical, la mystique du progrès enseigne à l’homme qu’il doit être la mesure de toute chose, que l’autonomie de sa volonté fonde le réel. À défaut d’être vraie, cette idée est rentable, et certains « philanthropes » l’ont bien compris.

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[1] Cf. Gaëtan Cliquennois, European Human Right Justice and Privatisation – The Growing Influence of Foreign Private Funds, Cambridge University Press, p. 257.

Stop au financement opaque des experts de l’ONU !
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