Protéger les enfants sur internet: un enjeu pour l’UE
Le 10 juin 2025, le Centre européen pour le droit et la justice était au Parlement européen à Bruxelles pour participer à la conférence intitulée « L’exposition des enfants à la pornographie : une forme d’abus sexuel ? ». Elle était organisée par la député espagnole Margarita de la Pisa (Patriotes pour l’Europe), en collaboration avec l’ECLJ.
Cet événement s’inscrivait dans l’actualité du Parlement européen qui travaille en ce moment sur la refonte de la directive de 2011 relative à la lutte contre les abus et l’exploitation sexuels des enfants, ainsi que la pédopornographie. Il devait permettre d’attirer l’attention des députés européens sur les dangers de l’exposition des enfants à la pornographie et sur la nécessité de traiter de cette question dans le cadre de cette refonte. En effet, en l’état, ce texte contient seulement une disposition prévoyant que les Etats prennent les mesures nécessaires pour que soit incriminé le fait d’exposer un enfant, intentionnellement et à des fins sexuelles, à des contenus pornographiques, ce qui ne permet malheureusement pas d’appréhender l’exposition des enfants à la pornographie en ligne causée par l’absence de protection des sites pornographiques.
Ce fut précisément le sujet de l’intervention de Priscille Kulczyk, chercheur associé à l’ECLJ. Elle a tout d’abord montré que l’exposition des enfants à la pornographie est une violence sexuelle devant être combattue, notamment en faisant en sorte que les plateformes pornographiques rendent des comptes dès lors qu’elles en sont largement responsables. Elle a ensuite expliqué qu’empêcher l’exposition des enfants à la pornographie répond aux objectifs de la refonte de la directive sur les abus et l’exploitation sexuels, en particulier ceux d’assurer la cohérence des domaines en ligne et hors ligne et d’assurer la prévention des abus et de l’exploitation sexuels concernant des enfants.
D’autres experts se sont succédé dans ce premier panel. Par le prisme de la psychologie, la psychologue française Marie-Estelle Dupont a mis en évidence le lien entre l’exposition des enfants à la pornographie et la question des abus sexuels en soulignant les conséquences de l’effraction et du traumatisme que représente un tel visionnage pour un enfant. Aurélie Garand, juriste de l’organisation française « Juristes pour l’enfance », a ensuite décrit l’évolution et les défis de la situation législative et jurisprudentielle prévalant en France en matière de protection des enfants contre l’exposition à la pornographie en ligne, avant d’exposer les atteintes aux droits des mineurs que représente une telle exposition. Celle-ci viole notamment leurs droits à la protection contre la violence, à la santé, à une information appropriée (CIDE art. 17), à l’éducation etc. Matthieu Bruynseels, Directeur des affaires politiques de l’Union Européenne à la Fédération des associations familiales catholiques en Europe (FAFCE), a traité de la compétence de l’UE pour protéger les enfants sur la base d’autres textes tel le Digital Services Act. Enfin, Jorge Gutierrez, directeur de l’association espagnole Dale Una Vuelta a traité des conséquences sociales de l’exposition à la pornographie et des outils de prévention.
Un second panel a enfin permis à des élues de prendre la parole sur le sujet de l’exposition des enfants à la pornographie. Rocio Aguirre Gil De Biedma et Blanca Armario, députées Vox en Espagne, puis Annamária Vicsek, députée européenne de Hongrie (Patriotes pour l’Europe), ont parlé de la situation dans leurs pays. Elles ont apporté un regard sociologique sur le sujet de la conférence en insistant sur l’importance de l’héritage culturel et de la nécessité pour les parents de s’investir dans l’éducation de leurs enfants afin de leur transmettre des valeurs familiales et d’engagement, tout cela face à la sexualisation des enfants et à la culture woke qui voudraient les remplacer.
Alors que Madame Vicsek a insisté sur le courage de dire NON à la pornographie qui n’est ni moderne, ni progressiste, il est nécessaire que les députés européens disent un NON ferme à l’exposition des mineurs en ligne. Ils disposent d’une opportunité avec la refonte de la directive de 2011 relative à la lutte contre les abus sexuels et l’exploitation sexuelle des enfants : ne pas en profiter pour demander aux Etats membres de prendre les mesures nécessaires afin d’empêcher la diffusion de pornographie en ligne dans des conditions dans lesquelles les enfants y ont accès compromettrait gravement l’efficacité future de ce texte. Cela reviendrait en effet à ignorer un pan entier du problème des abus et de l’exploitation sexuels des enfants que l’Union européenne prétend vouloir combattre.