About the Crime of "Digital Interference" to AbortionGradient Overlay
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About the Crime of "Digital Interference" to Abortion

"Digital Interference" to Abortion

By Grégor Puppinck1479210300000
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This article will be translated as time permits.

La proposition de loi n° 4118 relative à l’extension du délit d’entrave à l’interruption volontaire de grossesse est contraire à plusieurs principes fondamentaux garantis par le droit français et international, en particulier le principe de légalité des délits et des peines et le droit à la liberté d’expression. C’est un texte dangereux et liberticide.

L’article L. 2223-2 du code de la santé publique dispose actuellement :

« Est puni de deux ans d'emprisonnement et de 30000 euros d'amende le fait d'empêcher ou de tenter d'empêcher de pratiquer ou de s'informer sur une interruption de grossesse ou les actes préalables prévus par les articles L. 2212-3 à L. 2212-8 :

- soit en perturbant de quelque manière que ce soit l'accès aux établissements mentionnés à l'article L. 2212-2, la libre circulation des personnes à l'intérieur de ces établissements ou les conditions de travail des personnels médicaux et non médicaux ;

- soit en exerçant des pressions morales et psychologiques, des menaces ou tout acte d'intimidation à l'encontre des personnels médicaux et non médicaux travaillant dans ces établissements, des femmes venues y subir ou s'informer sur une interruption volontaire de grossesse ou de l'entourage de ces dernières. »

La proposition de loi en cause vise à lui ajouter un paragraphe ainsi rédigé :

«– soit en diffusant ou en transmettant par tout moyen, notamment par des moyens de communication au public par voie électronique ou de communication au public en ligne, des allégations, indications ou présentations faussées et de nature à induire intentionnellement en erreur, dans un but dissuasif, sur la nature, les caractéristiques ou les conséquences médicales d’une interruption volontaire de grossesse ou à exercer des pressions psychologiques sur les femmes s’informant sur une interruption volontaire de grossesse ou sur l’entourage de ces dernières. »

Ce texte signifie que toutes les personnes qui publient, notamment par internet, des informations sur l’avortement et ses les conséquences seraient passibles de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende.

En réalité, ce texte vise à interdire la dissuasion de l’avortement. Il est donc contraire à la loi Veil, dont la dissuasion constitue le leitmotiv, et aux engagements internationaux de la France (lors de la Conférence du Caire de 1994 les Etats se sont engagés à « aider les femmes à éviter l’avortement »).

L’exposé des motifs prétend que l’avortement est un droit fondamental reconnu par la loi Veil. Ceci est faux. Mme Veil a dit expressément en présentant son texte que si la loi « n’interdit plus, elle ne crée aucun droit à l’avortement ». Le livre de la santé publique consacré à l’avortement, reprenant l’article 16 du code civil, affirme que « La loi assure la primauté de la personne, interdit toute atteinte à la dignité de celle-ci et garantit le respect de l'être humain dès le commencement de sa vie » et poursuit : « Il ne saurait être porté atteinte au principe mentionné à l’article L. 2211-1 qu’en cas de nécessité et selon les conditions définies par le présent titre ». L’avortement est donc une exception, pas un droit. De son côté, la Cour européenne des droits de l’homme a aussi répété que la Convention européenne des droits de l’homme « ne saurait s’interpréter comme consacrant un droit à l’avortement » et aucun traité international ne reconnaît de droit à l’avortement.

Principe de légalité des délits et des peines

La proposition de loi vise officiellement les « allégations, indications ou présentations faussées et de nature à induire intentionnellement en erreur, dans un but dissuasif ». Cette définition du délit est trop vague pour répondre à l’exigence de légalité des délits et des peines, le législateur devant « définir les infractions en termes suffisamment clairs et précis pour exclure l'arbitraire » (Déc. n° 80-127 DC, 20 jan. 1981). L'exigence de clarté de la loi pénale « s'impose non seulement pour exclure l'arbitraire dans le prononcé des peines, mais encore pour éviter une rigueur non nécessaire lors de la recherche des auteurs d'infractions » (Déc. n° 2006-540 DC du 27 juil. 2006).

Selon l’article 8 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, « La Loi ne doit établir que des peines strictement et évidemment nécessaires ». La peine doit donc être proportionnée. Comme le souligne le Pr de Lamy dans les Cahiers du Conseil Constitutionnel (n°26, août 2009), « la loi doit répondre à des objectifs de modération et de précision rédactionnelle pour ne pas risquer d'être la source des abus qu'elle doit justement conjurer. Le législateur est, finalement, sous liberté surveillée puisque ce sont tant la teneur de l'interdit pénal que la manière de le formuler qui doivent être contrôlées pour que le principe légaliste soit une garantie contre l'arbitraire ».

Le principe nullum crimen, nulla poena sine lege figure aussi à l’article 7 de la Convention européenne des droits de l’homme, si essentiel qu’il n’est pas susceptible de dérogation même en cas de guerre ou autre danger public menaçant la vie de la nation. Il exige qu’une infraction soit clairement définie par la loi et interdit d’interpréter la loi de manière extensive ou par analogie.

Le flou de la définition, accompagné de l’exposé des motifs et des déclarations des promoteurs du texte montrent que l’intention est une interprétation extensive, contraire au principe d’interprétation stricte de la loi pénale et porte ouverte à l’arbitraire.

La liberté d’expression est un droit constitutionnel

Selon l'article 11 de la Déclaration de 1789, « La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l'homme : tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l'abus de cette liberté́ dans les cas détermines par la loi ». Cette liberté a valeur constitutionnelle (84-181 DC, 11 oct. 1984). Certes le législateur peut réprimer les abus dans l’usage de cette liberté. « Cependant, s'agissant d'une liberté́ fondamentale, d'autant plus précieuse que son exercice est l'une des garanties essentielles du respect des autres droits et libertés et de la souveraineté́ nationale, la loi ne peut en règlementer l'exercice qu'en vue de le rendre plus effectif ou de le concilier avec celui d'autres règles ou principes de valeur constitutionnelle » (84-181 DC, 11 oct 1984). « Les atteintes portées à l'exercice de cette liberté́ doivent être nécessaires, adaptées et proportionnées à l'objectif poursuivi » (2009-580 DC, 10 juin 2009).

Le Conseil constitutionnel insiste aussi sur la nécessité de garantir « l'expression de tendances de caractère différent » pour que les destinataires de l’information « soient à même d'exercer leur libre choix sans que ni les intérêts privés ni les pouvoirs publics puissent y substituer leurs propres décisions » (2009-577 DC, 3 mars 2009). Or, le site du gouvernement ne donne que l’information favorable à l’avortement. Il est donc nécessaire de compléter l’information et de proposer d’autres solutions pour assurer la liberté des destinataires de l’information.

La liberté d’expression est garantie par l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme.

La Cour européenne des droits de l’homme souligne notamment que la liberté d’expression constitue « l’un des fondements essentiels d’une société démocratique » (Handyside c. Royaume-Uni, 7 déc. 1976). La liberté d’expression « interdit essentiellement à un gouvernement d’empêcher quelqu’un de recevoir des informations que d’autres aspirent ou peuvent consentir à lui fournir » (Leander c. Suède, n° 9248/81, 26 mars 1987). Elle juge avec constance que le discours sur l’avortement relève de « l’intérêt public » et à ce titre bénéfice d’une très grande protection (Hoffer et Annen c. Allemagne, n°397/07 et 2322/07, 13 jan. 2011).

Le fait que l’avortement soit un sujet sensible n’est pas un motif légitime pour réduire la liberté d’expression. Au contraire, la Cour européenne insiste sur le fait que « la liberté d’expression vaut non seulement pour les ‟informations” ou ‟idées” accueillies avec faveur ou considérées comme inoffensives ou indifférentes, mais aussi pour celles qui heurtent, choquent ou inquiètent : ainsi le veulent le pluralisme, la tolérance et l’esprit d’ouverture sans lesquels il n’est pas de ‟société démocratique” » (Handyside). Concernant l’interdiction de la distribution de tracts pro-vie en période préélectorale, la Cour a conclu à une violation de l’article 10 de la Convention, rappelant à cette occasion l’importance de la liberté du débat politique et de la libre circulation des opinions et informations de toute sorte, surtout en période préélectorale (Bowman c. Royaume-Uni, n°141/1996/760/961, 19 fév. 1998). La Cour a souligné que les personnes ne doivent pas être privées d’« accès à d’autres modes efficaces de communication » (id.). La Convention étend sa protection aussi à l’expression sur internet (Yildrim c. Turquie, no 3111/10, 18 déc. 2012, § 54). Dans une affaire Csoma c. Roumanie (n°8759/05, 15 jan. 2013), la Cour a conclu à la violation du droit d’une femme devenue stérile suite à un avortement car celle-ci n’avait été « ni impliquée dans le choix de son traitement médical, ni informée correctement sur les risques de la procédure médicale ».

Il ne fait aucun doute que le législateur ne peut pas légitimement supprimer la liberté d’expression de tous ceux qui ne suivent pas la ligne officielle. Le pluralisme est nécessaire à la démocratie. En tout état de cause, une information ne peut constituer une entrave ni une pression psychologique, ni empêcher ses destinataires de chercher d’autres informations ailleurs.

Si la loi était adoptée, elle encourrait la censure du Conseil constitutionnel et son application entraînerait la condamnation de la France par la Cour européenne des droits de l’homme. Elle constituerait une grave atteinte aux principes de la démocratie et de l’état de droit.

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