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Surrogacy: A Violation of Human Rights

Surrogacy: A Violation of Human Rights

By ECLJ1392693540000

Available in French only.

Conseil des droits de l’homme

25è session.

17 février 2014

Le Secrétaire général a reçu l’exposé écrit suivant, qui est distribué conformément à la résolution 1996/31 du Conseil économique et social.

La gestation pour autrui (GPA) est une violation de la dignité et des droits fondamentaux des enfants et des « mères porteuses ». Cette pratique, qui institue l’exploitation des femmes et de la marchandisation des enfants, est contraire à de nombreuses dispositions de droit international ; pourtant, elle tend à se développer faute d’une véritable volonté ou capacité politiques de faire respecter le droit. Placés devant le fait accompli d’enfants obtenus à l’étranger, les autorités nationales sont poussées à tolérer cette pratique et finalement à la légitimer. Le plus souvent, la gestation pour autrui est employée par des personnes de pays riches afin de se procurer un enfant auprès de jeunes femmes de pays pauvres. En raison de son caractère généralement transnational, seul le droit international peut efficacement lutter contre cette pratique.

 

La gestation pour autrui : une vente d’enfant

La gestation pour autrui à but lucratif, et dans beaucoup de cas la gestation pour autrui non-commerciale, est un contrat par lequel un enfant est transféré de la mère porteuse aux parents contractants pour une rémunération ou un autre avantage or, selon l’article 2a) du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l'enfant, concernant la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants : « On entend par vente d'enfants tout acte ou toute transaction en vertu desquels un enfant est remis par toute personne ou tout groupe de personnes à une autre personne ou un autre groupe contre rémunération ou tout autre avantage ». La gestation pour autrui entre donc clairement dans le cadre de la vente et la traite des enfants prohibée par le droit international.

Dans un contrat de gestation pour autrui, il y a pour la femme une obligation de faire (porter l’enfant) et une obligation de donner (le remettre à autrui). L’objet du contrat est l’enfant, qui est donc traité comme une marchandise. La femme, quant à elle, est utilisée par les mandataires comme une machine permettant le développement d’un fœtus, c’est-à-dire comme un incubateur. Ni la femme ni l’enfant ne sont traités comme des personnes humaines, ils sont traités comme des objets. Ceci est manifestement contraire à la reconnaissance de la dignité inhérente à tous les membres de la famille humaine, pour reprendre les termes du préambule de la Déclaration universelle des droits de l’homme. Traiter une personne comme un objet est la caractéristique de l’esclavage. Dans un contrat de gestation pour autrui, la femme loue son corps, ou au moins une partie, son utérus.

La possibilité de vendre est un attribut du droit de propriété or, selon la Convention de Genève du 25 septembre 1926, «  L'esclavage est l'état ou condition d'un individu sur lequel s'exercent les attributs du droit de propriété ou certains d'entre eux ». La Convention de 1956 ajoute : « et l'«esclave» est l'individu qui a ce statut ou cette condition ». Certes, dans l’immense majorité des cas, les mandataires ou « parents intentionnels » traitent bien l’enfant[1]. Néanmoins, ils ont privé l’enfant d’une partie d sa filiation, et se ont choisi certaines de ses caractéristiques par la sélection de la mère porteuse et le cas échéant de la donneuse d’ovocytes[2]. Ils sont encouragés dans cette attitude par les agences de gestation pour autrui qui proposent des bébés « sur catalogue » à travers le choix des parents biologiques et du sexe de l’enfant. En outre ils ont déboursé des sommes importantes pour l’obtenir. En conséquence, ils veulent un enfant conforme à leurs attentes, comme un produit sous garantie. Ainsi, dès sa conception, l’enfant est sous l’emprise des choix des « parents commanditaires » : il ne nait pas « libre ».

Il n’existe pas actuellement de convention internationale concernant spécifiquement la gestation pour autrui. Il est cependant clair que cette pratique est inacceptable puisqu’elle entre dans la définition de la vente d’enfant.

 

La GPA, même non-commerciale, n’est pas éthique

Dans la plupart des cas, le contrat de gestation pour autrui est conclu moyennant une rémunération. Certains pays, espérant promouvoir une gestation pour autrui « éthique », l’ont autorisée à condition qu’elle ne soit pas à but lucratif, acceptant seulement une compensation « raisonnable ». En pratique cependant, il apparaît que cette compensation est le plus souvent sans rapport avec les éventuels frais, autrement dit qu’elle constitue en réalité une rémunération. En outre, même si elle est « bénévole », la mère peut en réalité être soumise à un chantage affectif, voire à des promesses ou des menaces concernant son emploi. C’est déjà le cas en ce qui concerne le don d’ovules en France, comme le souligne le rapport de l’Inspection Générale des Affaires Sociales[3]. Dans le cas de telles pressions ou promesses, l’enfant est remis non contre rémunération mais contre un autre avantage, donc il est vendu au sens de l’Article 2 du Protocole.

Certains pays permettent la GPA en cas d’infertilité médicalement constatée. Le fait que le but de la GPA en ce cas soit éthique, ne rend pas éthique le moyen mis en œuvre à cette fin : la fin ne justifie pas les moyens. Enfin, le fait de permettre la GPA sous conditions n’empêche pas que personnes qui ne remplissent pas ces conditions continuent à se rendre à l’étranger pour obtenir un enfant[4].

Tout ceci montre que les tentatives pour encadrer la gestation pour autrui sont vaines : cette pratique est intrinsèquement contraire à la dignité des femmes et des enfants. Il est illusoire de vouloir l’admettre dans certains cas particuliers en l’encadrant pour éviter les abus, comme au Royaume-Uni ou en Belgique : les ressortissants de ces Etats sont nombreux à se rendre à l’étranger pour échapper aux règles appliquées chez eux.

 

La GPA viole le droit international

De nombreuses dispositions concernant l’adoption internationale peuvent également s’appliquer à la gestation pour autrui. L’adoption internationale est encadrée par des traités pour éviter les trafics d’enfants. Certaines situations qualifiées de gestation pour autrui constituent en réalité des adoptions en violation des traités internationaux[5]. Tant la Convention de La Haye sur la protection des enfants et la coopération en matière d'adoption internationale (article 4) que la Convention européenne en matière d'adoption des enfants révisée (article 5) exigent notamment que le consentement des parents n’ait pas été obtenu moyennant paiement ou contrepartie d’aucune sorte et que le consentement de la mère ait été donné seulement après la naissance de l’enfant. En outre, le droit international relatif à l’adoption interdit les contacts entre familles adoptive et biologique. La Convention de La Haye (article 32) et la Convention européenne en matière d'adoption des enfants (révisée) article 17 précisent : « Nul ne peut tirer indûment un gain financier ou autre d’une activité en relation avec l’adoption d’un enfant ». Toutes ces dispositions sont violées par la gestation pour autrui.

Selon l’article 3 de la Convention relative aux droits de l’enfant : « Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, (…)  l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ».  La Convention relative aux droits de l’enfant  ajoute que « Les Etats parties s'engagent à respecter le droit de l'enfant de préserver son identité » (Article 8), or la filiation est une part essentielle de l’identité. Elle précise que l’enfant a « dans la mesure du possible, le droit de connaître ses parents et d’être élevé par eux » (article 7). L’enfant issu d’une gestation pour autrui peut avoir jusqu’à six parents : la mère génétique (donneuse d’ovocyte), le père génétique (donneur de sperme), la mère porteuse, son mari en vertu de la présomption de paternité et enfin les mandataires. Il est donc privé d’une part essentielle de son identité et placé dans une situation psychologique et juridique difficile  non pas dans sont intérêt mais dans celui des adultes.

Les conditions de naissance de l’enfant sont inhumaines et dégradantes, il en portera toute sa vie les conséquences psychologiques. Quant à la mère porteuse, soit elle est victime de sa pauvreté, soit elle est responsable des conditions de naissance de l’enfant en acceptant de le concevoir, de le vendre et de l’abandonner à la naissance.

 

La nécessité d’une interdiction spécifique en droit international

La GPA est, le plus souvent, une pratique transnationale : des personnes vont à l’étranger se procurer un enfant puis s’efforcent d’obtenir la reconnaissance de la filiation dans leur pays en mettant les autorités devant le fait accompli et en invoquant l’intérêt de l’enfant[6]. Les Etats doivent fermement refuser de céder à cette instrumentalisation de l’intérêt de l’enfant, sinon leurs ressortissants seront encouragés à contribuer à l’exploitation des femmes et à la marchandisation des enfants. Alors même qu’elle est contraire à de nombreux traités internationaux, la GPA continuera à se développer si on ne s’y attaque pas de façon volontaire par l’adoption d’instruments internationaux spécifiques.

Celle-ci pourrait prendre la forme d’un nouveau protocole à la Convention relative aux droits de l’enfant qui stipulerait[7] :

  1. Aucun médecin ou établissement ne doit utiliser les techniques de procréation artificielle pour la conception d’un enfant qui sera porté par une mère de substitution.
  2. Aucun contrat ou accord entre une mère de substitution et la personne ou le couple pour le compte de laquelle ou duquel un enfant est porté ne pourra être invoqué en droit.
  3. Toute activité d’intermédiaire à l’intention des personnes concernées par une maternité de substitution doit être interdite, de même que toute forme de publicité qui y est relative. 
  4. Les Etats parties n’ont pas à reconnaître la filiation établie à l’étranger d’un enfant né d’une gestation pour autrui.

 

[1] Il y a de tragiques exceptions. Dans l’affaire Huddleston v. Infertility Center of America Inc, (20 août 1997, Superior Court de Pennsylvanie) un homme célibataire aux Etats-Unis avait obtenu un bébé par une mère porteuse : l’enfant est mort de violences répétées au bout de six semaines – disponible à l’adresse http://caselaw.findlaw.com/pa-superior-court/1190217.html

[2] Les donneuses d’ovocytes et les mères porteuses sont sélectionnées sur des catalogues avec photos, selon leurs caractéristiques physiques et ethniques, mais aussi leurs capacités intellectuelles, artistiques ou sportives, leurs convictions religieuses, leur vie sexuelle, leurs antécédents médicaux et ceux de toute leur famille. La vie des mères porteuses est strictement réglementée pendant toute la grossesse.

[3] Etat des lieux et perspectives du don d'ovocytes en France, Février 2011, Documentation française, p. 25 http://www.ladocumentationfrancaise.fr/var/storage/rapports-publics/114000113/0000.pdf

[4] Voir par exemple l’affaire soumise à la Cour européenne des droits de l’homme D et R c. Belgique (req. 29176/13)

[5] Voir par exemple l’affaire soumise à la Cour européenne des droits de l’homme Paradiso c. Italie (req. 25358/12)

[6] Voir par exemple les affaires soumises à la Cour européenne des droits de l’homme Mennesson c. France (req. 65192/11) et Labesse c. France (req. 65941/11)

[7] Les trois premiers paragraphes sont issus du quinzième principe proposé en 1989 par le comité ad hoc d’experts sur les progrès des sciences biomédicales constitué au sein du Conseil de l’Europe, relatif aux « mères de substitution ».

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